Comment publier un livre du domaine public ? (Suite et fin)
Posté le 28/03/2017
ou Comment un éditeur de livres rares et anciens, libre de droits, choisit ses publications ? (suite et fin)
Après la lecture du premier article sur le sujet, continuez-vous de vous demander, comment publier un livre du domaine public ? J’imagine que vous avez sué d’impatience pour savoir la suite et la recette du succès pas vrai ? Alors si définitivement, vous voulez avoir les dernières cartes en main sur comment un éditeur de livres rares et anciens choisit les livres qu’il va publier, lisez ce qui va suivre !
Plus sérieusement, nous avons vu dans la première partie de l’article que vous pouvez retrouver ici, les 3 premiers critères qu’un éditeur prend en compte pour potentiellement publier un livre. La première partie se concentrait sur les critères que je qualifiais comme qualitatifs et éthiques.
Voyons maintenant ensemble les 3 critères restants, que je définirais de pragmatiques et commerciaux. Je vous vois déjà venir avec vos insultes (pourri, collabo, vendu et autres joyeusetés !) à la lecture des mots « pragmatiques » et « commerciaux ». Soyons sincères, même si au premier abord, ces critères peuvent paraitre laids ou effrayants, inacceptables, ils ont tout de même leur importance.
Ne l’oublions pas, à grande échelle, les éditeurs deviennent avant tout des gestionnaires et des chefs d’entreprises ! Et les contraintes pragmatiques et budgétaires sont toujours, qu’on le veuille ou non, bien présentes, et votre éditeur préféré (les éditions Ether et Egregore non ?) n’y échappe pas non plus.
Pour rappel, (ça fera 100 euros s’il vous plait) voici la liste des 6 critères pour notre futur et potentiel bestseller, classés subjectivement par ordre d’importance :
- Entre-t-il dans les domaines, les sujets de prédilections de l'éditeur ?
- La qualité de l'ouvrage répond-telle à l’exigence du contrôle qualité définie?
- Colle-t-il avec la charte éditoriale de la maison d’édition ?
- Rempli-t-il un manque sur le marché de l'édition ?
- Répond-t-il aux normes et aux critères financiers ?
- Et son potentiel de vente alors ?
Venons-en donc enfin à ces fameux trois dernières règles d’or, pour publier un livre du domaine public :
La disponibilité et l’absence d’un livre sur le marché, un critère important dans la réédition d'un livre du domaine public
Bon, l’éditeur a trouvé le super livre libre de droits, il a répondu à tous les critères précédents, mais est-il déjà édité ?
Première option : Non. Tout va bien, la voie est libre et il ne reste plus qu’à la maison d’édition d’honorer le livre en lui fournissant une enveloppe de qualité et un contenu qui l’embellisse vraiment.
Deuxième option : Oui. S’il est déjà édité, il y a deux choix alors à la disposition de l’éditeur.
- Soit se résigner et repartir bredouille,
- soit l’éditer avec les risques de concurrence qui en découlent (s’attirer les foudres de l’éditeur concurrent, être dans l’ombre de sa plus grande médiatisation, ou purement et simplement ne pas réussir à le vendre).
Dans le deuxième cas, et ça nous est arrivé pour les éditions Ether et Egregore, nous avons déjà fait le choix de publier un livre déjà disponible sur le marché. Pourquoi ? La réponse se trouve dans le 1er critère.
L’éditeur est un lecteur passionné, et il arrive qu’il ait des compétences particulières et un coup de cœur pour un livre. Ces deux facteurs peuvent le pousser alors à croire (à tort ou non n’est pas la question) qu’il pourra proposer une édition avec une réelle plus-value sur le marché.
Et parfois, (et c’est pas de chance) il y a un concours de circonstances qui fait qu’un même livre du domaine public sorte à une période relativement proche, (chose qui nous est aussi déjà arrivée), et qui pousse alors à retarder sa sortie, l’annuler, ou continuer, avec les risques de concurrence encore plus accrus.
Le format du livre du domaine public et les questions budgétaires, sont des questions que l'éditeur indépendant prend en considération
Dans les questions terre-à-terre qu’un éditeur prend en compte, (et pour laquelle le lecteur de ce billet nous a maudit auparavant), il y a celles liées au format de l’ouvrage libre de droit. J’entends par là essentiellement son nombre de pages. Je vous explique :
Travailler sur un livre-fleuve demandera systématiquement des fonds financiers plus conséquents et un travail beaucoup plus long. Dans le cas d’une micro maison d’édition, telles les éditions Ether et Egregore, où je suis seul capitaine à bord, cela à malgré tout, son importance.
Publier essentiellement des gros livres fera un calendrier des publications espacé pour la petite librairie ésotérique. Ceci pourra également décourager certains lecteurs, n’ayant pas forcément l’habitude de lire des bouquins de 500 ou 600 pages et se restreindre à un public spécifique. Au contraire, il pourra ravir le « gros lecteur » ou le chercheur, tout comme l’éditeur qui devra fournir un travail plus conséquent mais plus exigeant et « ambitieux », (même si je n’aime pas ce mot.)
Tout est alors une question de choix et de compromis sur la balance (ou la justice pour les familiers du tarot).
Le potentiel de vente du livre du domaine public, l'aspect non négligeable du livre libre de droits à prendre en compte par la librairie ésotérique, de livres rares et anciens
Après avoir traversé ce parcours du combattant des idées (et le travail sur le livre n’a pas encore commencé !) vient l’ultime question : Est-ce que ce livre se vendra ?
Mais ce n’est pas tout, faut-il encore que des lecteurs y trouvent chaussure à leur pied. L’éditeur s’interrogera encore avec des pistes telles que celles-ci : le livre traite t-il un sujet peu développé sur le marché ? Explore-t-il une niche ? Est-il controversé ou provocateur ? Les réactions des lecteurs seront-elles positives ? L’auteur est-il aimé par la communauté ?
Petite note personnelle : ce critère s’applique assez peu dans le cadre des éditions Ether et Egregore, par le simple et premier fait que nous publions à tirage très limité nos sorties (et que notre objectif n’est pas de devenir riches et d’avoir le monopole…).
Et hop, l’échelle des 6 critères franchie avec succès, le livre tombe magiquement du ciel (avec un peu de travail, je vous l’accorde !) entre les mains des lecteurs en pagaille…
Et je me permets de vous redonner l’ouverture du premier article :
« Et vous, quel est votre avis sur le sujet ?
Qu’est-ce qu’un bon livre ? Qu’est-ce qu’un bon éditeur ? »
Comme à l’accoutumée, je vous encourage à partager et à faire entendre votre voix, car ne l’oubliez pas, votre soutien et vos partages font notre passion et notre force !
Merci d’avoir lu jusqu’au bout, j’espère que cet article vous aura plu,
Gaëtan.
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